Des gouts et des couleurs, remix

Il y a quelques années, j'avais parlé assez rapidement et succinctement de différentes colorisation de certains comics et BD içi, sans trop entrer dans les détails.

La sortie de Sandman en version télé m'a fait revenir vers cet ancien article et surtout vers de vieux souvenirs, et les points que je voulais traiter, mais que je n'avais pas fait à l'époque du premier article.

La mise en couleurs par aplats, sans respecter le spectre 'réel', mais en jouant sur les sentiments, le ressenti, sur le système limbique, n'est plus trop à la mode depuis l'arrivée de la colorisation informatique.


La couleur Orange qui renvoie à l'attaque et à l'urgence, le jaune sur Ed pour la peur, le vert pour le calme, la paix, et le reflet rouge de l'autre personnage pour montrer la colère, l'énervement, l'urgence.

Et pourtant, si je vous dit "tu es vert de jalousie", " il était rouge de colère", "rire jaune", "avoir une peur bleue" ... et d'autres, cela va vous parler.
De plus une couleur peut être associée à plusieurs sentiments, parfois opposés.
- Avoir la main verte, vert de rage, se mettre au vert ...


Une simplification des couleurs, le bleu clair pour l'ombre et le coté paisible, le jaune reflète la chaleur et la lumière. Le Bleu marine pour renforcer le coté calme et détendu du soldat, puis case suivante, rouge, alerte rouge !!! (bon, euh.. Alerte magenta ...)

Un bon coloriste, par le passé, jouait sur les sentiments renvoyés par la couleur, aujourd'hui le coloriste va coller aux couleurs du spectres, même si certains (les plus habiles) vont jouer sur la chaleur ou la complémentarité de tons.


Ed Marks passe par plusieurs sentiments.. Bleu le calme, la détente (il regarde le film au cinéma plein air) , le jaune qui renvoie à la fois à l'explosion et la peur, le rouge, pour le feu et la colère suivi de la résignation, et enfin retour au bleu pour le calme de l'acceptation.

Je me souviens d'une discussion que j'ai eu il y a bien longtemps (1987 ? 1988 ? ) avec le professeur d'Anglais que j'avais à l'époque - qui me laissait tranquillement dormir au fond de la classe, vu que j'avais un niveau supérieur à la classe - un jour on avait discuté de comics, je lui avais présenté The 'Nam, le 1er TPB, vu que ce n'était pas du Super-Héros et il nous voyait bien parler de la série en cours, utiliser le langage du comics, et la mise en couleur - this one is green with envy, that man is painted yellow to show he is not well , red hot inferno  ...
Car les expressions Anglaises et Françaises qui reprennent les couleurs sont bien souvent assez similaires et proches.

Episode 4, couleurs de Phil Felix, qui joue bien du rouge et jaune pour l'explosion, l'excitation, l'adrénaline, puis sur la dernière, le vert pâlot, livide, après la baisse d'adrénaline, le mal être ...

Le premier épisode de The 'Nam a été mis en couleur par Michael Golden, qui joue bien mieux sur les choix de couleurs que Phil Felix qui prends la relève à partir du 2me numéro, mais qui a tout de même quelques excellentes initiatives.


Mais revenons-en à Sandman, les 18 premiers épisodes ont été mis en couleur par Robbie Busch, puis Steve Oliff a pris la suite avant de céder sa place à Daniel Vozzo (23), qui refera toutes les couleurs (à l'époque des 'Absolute', en 2000) en collaboration avec Zylonol*.
Et entre la mise en couleur de Robbie Busch et celle de Vozzo, il y a tout un monde.
Je vais en explorer quelques pages qui me semblent flagrantes de l'épisode 14 - The Collectors, l'épisode qui, à l'époque (1990), m'a fait complétement adhérer à la série.


Dés la première page, les choix ne sont pas les mêmes , là ou Busch va utiliser le rouge et le jaune pour que l'enseigne nous saute aux yeux, Vozzo est plus gentil calme, se fond dans le paysage. le reste de la page est du même genre, Busch en limitant les teintes, et en utilisant beaucoup de pourpre rend l'ambiance oppressante. Vozzo a des bleus plus chauds , du vert, et du jaune qui éclaire la page. Mêmes les nuages et la lune de la dernière case sont plus lugubre chez Busch.



Dans cette page, Busch limite à nouveau sa palette, ce qui permet de suivre les dialogues, sans trop s'arrêter sur les personnes présentes, il joue sur des rouges / oranges pour donner un teinte 'sale', comme dans un vieux film d'horreur, et le jaune du personnage met en avant son discours... malsain.
A nouveau la vue extérieure offre deux versions très différentes.


Quand Rose regarde par la fenêtre, Busch nous montre la luminosité se refléter sur son corps. l'ambiance de la chambre fait bien plus cheap que celle de Vozzo, et le couloir, avec rose toute blanche, est bien plus oppressant chez Busch.


Alors que Busch nous propose une masse de spectateurs verte (malades?) non identifiable, Vozzo va nous les isoler les uns les autres. Nimrod aussi est uniforme dans l'ombre, tout comme son souvenir dans ce magenta sanglant, sale. Le reste de la page qui reste sur les rouges, et marrons foncés, appuie l'idée oppressante et malsaine.


Même remarque que pour la page précédente, à laquelle je peux ajouter que Vozzo est bien plus lumineux que Busch.


Mise en couleur minimaliste qui laisse libre court aux évènements, contre mise en couleur plus habituelle ...


Que dire que je n'ai déjà dit, mais on notera le vert émeraude qui permet de ressortir l'ambiance nocturne et lugubre, et ce dessin de Dringenberg laissé en l'état ...


A nouveau Busch a choisi de laisser le dessin en l'état, en le rehaussant d'un outremer.



Encore une fois, 2 ambiance à nouveau très différentes.
Et quand Daniel Vozzo use de rouge pour donner dans la violence, j'ai un peu de mal, je trouve trop gentillet.



Et je terminerai sur la lumière des néons d'une nuit oppressante.
Les gouts et les couleurs font un monde, et j'espère que vous avez put voir que suivant le coloriste, on a 2 histoires bien différentes.

Et pour moi Robbie Busch colle à merveille sur Dringenberg, et sur les ambiances les plus glauques de la série.


Bonnes lectures !!!


je vous mets ce lien si vous voulez aller un peu plus loin sur les couleur set leurs expressions l'usage des couleurs dans les expressions



* Zylonol était un studio de séparation de couleurs (l'étape entre le coloriste et l'imprimeur) fondée par Lee Loughridge, qui a essentiellement travaillé pour DC Comics à partir de 1998






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